أقترح عليكم هذه المرّة مقالا لأحد أبناء جندوبة البررة أهداه إلى روح الدكتور بدر الدّين العلوي ضحيّة حادثة المصعد بمستشفى جندوبة ويتناول فيه وضع وإشكاليات الصّحة في الجهةمع لمحة تاريخية دقيفة.

صاحب المقال من انجب النجباء منذ كان تلميذا بمدرسة النّور مرورا بمعهد خزندار وصولا إلى كلّيّة العلوم التي تخرّج منها أستاذا للفيزياء ثمّ تولّى بامتياز مهمّة التّفقّد في المعاهد الثّانويّة. ما يشدّ الإنتباه هو إتقان هذا "السيونتيفيك" للغة الضّاد ولغة موليار على حدّ السّواء وبأسلوب مميّز

إنّه الرّائع عبد الحميد بن هنده

من ناحيتي حاولت إثراء هذا المقال ببعض الصّور للجيش الأبيض من الرّعيل الأوّل. ( حسن الغربي)

À BADREDDINE victime de la mort des consciences

Où êtes-vous « gens de bien » de Jandouba qui avez blanchi sous le harnais de la Santé Publique depuis l’Indépendance sillonnant les campagnes à vélo ou d’autres moyens de transport pour vacciner, soigner, piquer, distribuer pilules et autres aux enfants des écoles aux femmes et hommes qui triment dans les champs… ?

N’y a-t-il plus parmi vous des survivants pour narrer aux jeunes les épopées des temps révolus des légionnaires en blanc qui avaient fait reculer la gale, la tuberculose, la polio, la teigne, les poux, jusque dans les chaumières les plus isolées des montagnes et forêts du Nord-Ouest… ?

N’y a-t-il plus parmi vous un seul pour poser les questions et rappeler ce que tout le monde semble avoir oublié ?

Quant à moi, je n’ai pas la prétention d’en savoir plus qu’aucun d’entre vous mais le peu qui hante encore ma mémoire (plus ou moins encore claire) est toujours source d’amertume et de colère.

Qui se souvient en effet quand un Hopital Régional fut construit à Jendouba par l’Etat depuis 1956?

Dans les années 50 le chef-lieu du Caidat de Souk-el-Arba comptait :

--une pharmacie (tenue, fait rare, par un tunisien feu Mr KABANI natif de Bab Souika)

--deux cabinets de médecins généralistes Dr Bernard et Dr Sattari

--une clinique privée (très belle mais petite bâtisse) tenue par un chirurgien Dr Caillavet bâtie dans le sillage de l’ouverture et l’embellissement de l’Avenue des Palmiers après la Guerre (avec La Douane, le Tribunal cantonal…). La clinique fonctionnait avec un personnel français (les Sœurs Blanches) pour les colons essentiellement et accessoirement pour les riches indigènes (fonctionnaires, bourgeois et cultivateurs). Pour le reste des démunis c’est la loterie des soins médicaux ; on se rabat soit sur « l’Hôpital » de Souk-el-Khemis, soit sur la Clinique du Dr Dubos de Béja (reprise par la suite par Dr Harrouch), soit encore sur « l’hôpital de Ain Draham.

Après l’Indépendance et le départ des colons, la ville a hérité de la clinique baptisée pompeusement HOPITAL REGIONAL ( !).

Dans les années 60 après « El Jala » la garnison de la Légion Etrangère laissa sur place un petit hôpital militaire aussitôt occupé par l’HOPITAL REGIONAL (bis) dans l’enceinte de la caserne aux mains de l’Armée Nationale. La clinique Caillavet devint le Tribunal de Première Instance et le grand parc derrière accueillit la Banque Centrale régionale.

Le personnel médical était en grande partie constitué de médecins des pays de l’Est (Bulgares Tchèques…) qui ont rendu de grands services à la région. Mais l’infirmerie des soldats français étaient tout juste bonne pour remplacer un dispensaire dans une ville en croissance exponentielle (exode rural surtout). L’aide chinoise est arrivée à point nommé massive et généreuse dans la région avec la fameuse route Amdoune-Ain Draham (dite des sept cheikhats) pour désenclaver cette dernière et, surtout, un CHU à la mesure des besoins de la région.

Le CHU drainait les malades de très loin et les équipes de médecins chinois (une trentaine) se relayaient dans toutes les spécialités dont l’acupuncture.

L’hôpital de la caserne se métamorphosa en un collège technique (!!!) et transféré à l’Education Nationale.

Quand il fut question de terminer la dernière tranche du CHU (la 4ème aile et le dernier côté du carré ) des voix se sont élevées pour s’y opposer. Je rapporte ici les paroles de mon ami feu Mohsen Hakim ( jendoubien, Econome de l’Hôpital Reg.de Béja ) présent à la réunion du Conseil Régional à Béja qui devait en décider. Les propos méprisants du Directeur Régional de l’époque firent vraiment mal à beaucoup de présents : « les fonds de l’extension seraient plus utiles ailleurs et puisياسرفيهم الي حصل ليهم »

Traduisez comme vous voulez ce genre de propos inouïs de la part d'un responsable qui se respecte.

Pourtant ce CHU a vu défiler dans ses couloirs des praticiens tunisiens de grande valeur qui ont imprimé des traces indélébiles dans les mémoires jusqu’à ce jour : Dr Zaouali cardiologue (un de mes condisciples de Khaznadar), Dr ou Pr Ayachi chirurgien … Finalement je crois que les chinois eux-mêmes se sont rendu compte qu’il est impossible de contrecarrer la tendance générale à la dégradation du bel Hôpital due à l’atmosphère délétère aux relents de malversations et corruptions diverses ; il y eu même quelques tentatives de les enrôler dans le « système » aux dires de certains de mes amis jandoubiens.

Après le départ des chinois et les réticences (justifiées ou pas) des spécialistes tunisiens de la Faculté à assumer son fonctionnement, le bel Hôpital se vit déchu de son titre de CHU en Hôpital Régional. La dernière fois que j’ai visité les lieux (il y a 20 ans) j’ai été tout de suite sidéré de constater que les couloirs du rez-de-chaussée étaient recouverts de carreaux de faïence de 3ème choix avec une finition catastrophique. J’ai demandé autour de moi : « où sont passés les grosses plaques de 2cm d’épaisseur de beau marbre vert importé d’Italie qui tapissaient ces couloirs jusqu’à 2m de hauteur ? »

On m’a répondu que le Directeur de l’hôpital a fait faire des travaux de réfection vu la dégradation ou le vol de quelques-unes des plaques... irremplaçables (!!!). Excellente initiative ! Reste à savoir qui s’est approprié indûment les centaines de m² de marbre précieux. INTOLERABLE !

Alors les jandoubiens, ne nous lamentons pas trop ; ce qui nous arrive aujourd’hui est le résultat de décades de laisser-aller et de négligences. Nous n’avons même pas réussi à conserver en bon état ce que nous avons reçu d’héritage en héritage péniblement jusqu’au cadeau. Qui est responsable ? Qui dénoncer ?

Mes propos pourraient vous sembler teintés de régionalisme médiocre mais seuls ceux qui marchent sur les braises en ressentent les brûlures.

ADIEU BADREDDINE, fasse Dieu que ta disparition tragique, douloureuse, inoubliable, puisse fouetter les consciences assoupies des quelques justes qui restent encore dans ce pays.